Bloody Niggers

J'assiste à de nombreux spectacles grâce au FESMAN. Certes, Dakar est loin d'être un désert culturel... et le Fesman nous permet de voir des concerts magistraux ( Angélique Kidjo, Tiken Jah Fakoly, Salif Keita...), des pièces de théâtre de grande qualité (The End, Black bazar, la Marmite de Koka Mballa, Bloody niggers, Coeur des enfants léopards...)
Le programme ne révèle que peu de choses de la thématique des pièces, installée penaude dans mon fauteuil rouge, me voilà toute curieuse de voir quel tourbillon va m'emporter. Et alors là, que de bonnes surprises, des pièces à l'écriture ciselée, aux émotions fortes, à l'engagement féroce... j'en suis sortie bouleversée, retournée mais toujours heureuse. La littérature africaine a souvent mauvaise presse auprès des lecteurs à cause de la dureté de son contenu : des guerres, des génocides, des épreuves insoutenables, ...une sorte de catharsis pour expliquer cette douleur d'avoir été utilisés, rendus esclaves, acculturés, colonisés. Mais je ne veux pas faire là le lit ni de la victimologie systématique du peuple noir ni des positivistes de la colonisation et de son pendant contemporain qu'est la Françafrique.

BLOODY NIGGERS! - Rencontres de la Villette 2007
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La pièce m'a poursuivie de ses questionnements la nuit durant.... m'apportant d'autres interrogations et d'autres colères trop longtemps contenues : Comment le 11 septembre (et je suis désolée pour les 3000 victimes et leurs familles) autorise-t-il une guerre sainte ? Pourquoi minimise-t-on le génocide Rwandais qui fit près d'un million de morts, ... peut-être parce que ce sont "des sauvages "? Pourquoi sommes-nous frappés d'amnésie collective ? Pourquoi le blanc pense qu'il a toujours raison ? qu'il vaut mieux que celui qui est différent ? Pourquoi le mythe du bon sauvage de Rousseau est-il aussi tenace quand on voit un homme à la peau noire ? Pourquoi pense-t-on que l'africain aime seulement rire, danser et "faire gourougourou dans la case"? Pourquoi le blanc se réfugie derrière le déni de religion pour ne pas voir que nous avons non seulement tenté d'imposer notre religion mais aussi et surtout notre culture, notre manière de penser.... (aujourd'hui encore) ? La religion ne fut qu'un prétexte, une excuse pour que le blanc domine l'autre sans trop de culpabilité ? Pourquoi dénigre-t-on l'homme noir en le comparant à un animal, en sous-estimant son intelligence, en dévalorisant ses caractéristiques physiques (nez aplati, lèvres charnues...) ?

Tout comme le sexisme, aujourd'hui encore le racisme est tenace ! Je n'ai jamais été victime d'attaques racistes du fait de ma peau immaculée et de ma naissance.

Par contre, j'ai un ami sénégalais qu'une dame âgée (éduquée à l'école laïque et républicaine du pays des droits de l'homme) a insulté au XXIème siècle dans la rue d'une ville moyenne, en lançant à sa voisine : " Tu as vu celui-là avec sa tête de singe ? "

Que dire ...... sinon Pardon !